Athlète espoir ! À quel prix ?

le prix des sports d'élite, journal des citoyensMaxandre qui soulève les bras en signe de victoire à la fin d’une des courses auxquelles elle a participé. Photo courtoisie
Jacinthe Laliberté
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Le sport d’élite et la charge financière

Jacinthe Laliberté – La saison de sports d’hiver se terminera bientôt. Les résultats des divers championnats provinciaux ou nationaux déterminent la réussite d’une saison et conséquemment, la possibilité d’accéder à un palier supérieur. Pour plusieurs, les exigences sont nombreuses et, particulièrement, celles reliées aux charges financières que nécessitent leur sport.

Nombre d’enfants rêvent, déjà en bas âge, au rêve olympique. Peu importe le sport, les parents sont toujours présents. La réalisation de leur petit devient une préoccupation de tous les instants. Mais ce rêve peut, rapidement, se transformer en déception voire en désillusion si les moyens financiers ne sont pas au rendez-vous.

Une petite histoire comme celle de bien d’autres 

Maxandre Choquette a commencé à skier à l’âge de trois ans. Elle participa à sa première compétition à l’âge de six ans. Maintenant, âgée de 13 ans, elle s’est inscrite au programme régional de ski à l’école secondaire Augustin-Norbert-Morin ce qui lui permet de s’entraîner régulièrement sans s’absenter de l’école. Élève accomplie, elle maintient une moyenne de 90 % ; elle s’implique dans le conseil étudiant ainsi que dans le Lab finance géré par Desjardins. Outre le ski alpin, Maxandre fait du vélo de montagne, de la natation et de la course à pied.

Au tournant de la saison 2022, l’entraîneur l’a déclarée « Athlète espoir » dans les bases de données de Ski Québec alpin (SQA). Son souhait est d’être admise dans l’équipe du Québec. « Ce qui freine Maxandre n’est pas une question de performance, mais clairement une question d’argent », de confirmer son père.

Le financement, dans la cour des parents

Certains parents ont des entreprises, des commerces; d’autres ont, tout simplement, un revenu suffisant leur permettant de financer les dépenses dévolues à l’échelon de performance où se trouve leur enfant. Par contre, d’autres parents travaillent doublement soit en investissant tout leur avoir soit en hypothéquant leur maison.

Élaine Bertrand, directrice générale de Division laurentienne de ski (DLS), s’occupe des 1 600 athlètes des Laurentides. « Arrivés au niveau provincial et national, beaucoup d’athlètes décrochent. Nous n’avons pas un système qui permette de soutenir l’élite sportive chez les jeunes, car deux facteurs contrôlent le tout : l’argent et les études », d’expliquer la directrice générale.

Elle poursuit ainsi son explication : « Pour aider les athlètes, il n’existe pas grand-chose. Les parents et les commanditaires sont les sources de financement. Pour une athlète de 12-13 ans sur un programme élite, le coût est évalué, minimalement, à 12 000 $ pour une seule saison ».

Selon Élaine Bertrand « Une aberration reste une aberration. Pourquoi les parents ne peuvent pas obtenir un crédit d’impôt pour l’aide à un athlète élite identifié par la Fédération, au même titre qu’un commanditaire qui lui, bénéficierait d’une ristourne de 50 % sur ses impôts pour la même raison ? ».

Et les instances sportives ?

Quant à Ski Québec alpin (SQA), le directeur de la section Haute-performance, Éric Préfontaine, est très clair sur le sujet. Il n’y a pas de financement pour la catégorie « Athlète espoir ». 

Quant au ministère de l’Édu-cation, il supporte les athlètes au niveau du transport et du logement s’il est intégré dans un programme sport-étude. Si l’athlète ne requiert pas d’aide à ce niveau, il ne profite d’aucun autre soutien. 

Maxandre est encore au bas de l’échelle. Plus elle gravira les échelons, plus le critère financier prendra de l’importance. Tel fut le cas de plusieurs athlètes olympiens qui, au lieu de se concentrer sur leur entraînement, ont été dans l’obligation de faire des soupers spaghetti pour payer leur année olympique. 

Les parents de Maxandre, qui ont toujours été très conscients du coût que peut entraîner la pratique d’un tel sport, se questionnent. Les dépenses, en plus d’être récurrentes, augmenteront d’année en année. Pour eux, les aspirations de Maxandre ne sont pas seulement un rêve, mais une réalité confirmée par la Fédération. 

Les souhaits de Maxandre

Trouver un club qui lui offrirait de s’entraîner plus longtemps et à moindre coût est son désir le plus cher. « L’an prochain, je vais dans la Relève, à Saint-Sauveur. C’est un programme qui offre plus de temps d’entraînement et des camps situés au Québec comme au mont Édouard, contrairement aux autres clubs élites où les camps d’été se déroulent en Europe », d’expliquer Maxandre du haut de ses 13 ans.

Une exigence du Ministère : s’entraîner un minimum de 10 jours entre le 15 avril et le 1er décembre, ce qui est impossible sans aller en Europe. Maxandre n’a pu répondre à cette exigence. 

Une autre réalité : la jeune athlète compétitionne contre des filles qui ont skié entre 140 et 150 jours pendant qu’elle n’a que 112 jours à son actif. Malgré ce fait, elle se classe pami les cinq premières de sa catégorie et a été nommée par l’entraîneur-chef de ski Québec alpin « Espoir Laurentides ». 

À la recherche de commanditaires

La jeune athlète travaille déjà à ramasser des fonds pour payer une partie de ses camps supplémentaires d’où une demande envoyée à la Municipalité de Sainte-Anne-des-Lacs.

Certaines compagnies croient au potentiel de Maxandre. Nordica la commandite pour ses skis et ses bottes ; Vola pour les casques, lunettes et bâtons ; Energia Pura pour ses vêtements de compétition ; Fit-Lav Solution pour le moulage de ses bottes. Grâce à ces commanditaires, la facture annuelle se trouve allégée. Mais, il reste tant à trouver pour cette athlète dont la détermination est à toute épreuve.

Des espoirs mitigés

Le mot de la fin revient à Élaine Bertrand de DLS : « Est-ce que nous avons un système qui aide les meilleurs ou seulement ceux qui ont les moyens d’être là, et ce, sans vouloir discréditer ceux qui ont des moyens financiers ? Comment fait-on pour supporter les meilleurs pour qui le rêve semble à leur portée, mais dont les moyens financiers le rendent inaccessible ? »

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